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Tel est le message d’espoir porté par Carlos Moreira, le CEO de Wisekey, en amont de l’ouverture du premier Geneva Annual Blockchain Congress lundi 21 janvier.

Si Genève a manqué la révolution du web – pourtant inventé au CERN par Tim Berners-Lee il y a 30 ans – celle du mobile – avec le départ du Salon Telecoms au profit du Mobile Word Congress à Barcelone – elle ne doit pas laisser passer cette chance ultime que représente la révolution blockchain. Carlos Moreira, CEO de Wisekey, le martèle: Genève possède le potentiel pour devenir le pôle de référence dans la blockchain. Il salue l’initiative du Canton de Genève et de Palexpo de lancer lundi 21 janvier cette première édition du Geneva Annual Blockchain Congress. Après l’accueil de Robert Hensler, Président de Palexpo suivi du discours d’ouverture de Patrick Odier, Associé, Banque Lombard Odier; Don Tapscott, Directeur exécutif du Blockchain Research institute, dressera le panorama de la blockchain dans le monde. Ce dernier participera ensuite au panel avec Carlos Moreira, modéré par Hans Schwab, CIO de Wisekey sur le thème: comment Genève peut-elle devenir un hub international de la blockchain? Le programme complet du Congrès se trouve dans le lien suivant: https://www.genevablockchaincongress.com/programme/

Rencontre avec Carlos Moreira, CEO du groupe Wisekey et son ambition quasi-politique pour Genève.

Quels sont les atouts de Genève face à cette «révolution» blockchain?

Genève possède le pétrole de l’économie digitale: les données. Elles sont stockées sur des serveurs en Suisse, conservées en silo et issues des organisations internationales, qui certes font la Genève internationale, mais appartiennent à la Genève analogue. Il n’y a aucun développement de la richesse digitale lié à leur présence, que je qualifierai même de stérile, du point de vue digital. La blockchain va leur fournir des outils leur permettant de décentraliser leurs données hautement stratégiques et d’en donner accès à la population mondiale.

Après avoir manqué la révolution du web, malgré son invention à Genève par Tim Berners-Lee, il y a 30 ans; celle du mobile au détriment de Barcelone et son Mobile World Congress (MWC); Genève, ville analogue, doit se positionner dans le digital et sortir l’huile, pour fabriquer l’essence. Ses atouts ne sont pas exploités par Genève, dont le sol regorge de puits de pétrole et que personne ne fait sortir, afin de les monétiser dans l’économie digitale.

N’oublions pas que la data est le pétrole pour l’intelligence artificielle, dont les algorithmes ont besoin pour fonctionner de façon efficiente. Avec de mauvaises données, de mauvais résultats.

Mais Genève n’est pas seule dans cette course ultra-compétitive de la blockchain.

En effet, mais elle possède un modèle unique: les données de toutes les agences onusiennes, les ONG, la Cnuced, l’OMC, l’OMPI, l’IUT, les sièges sociaux, le CERN, IATA, le WEF, le CICR. Certes des villes comme Washington ou Bruxelles, sont également riches en données, mais c’est une bonne nouvelle. Car plus la blockchain aura d’applications, mieux ce sera pour Genève. Pensez aux données dans le domaine de la santé avec les données mondiales de l’OMS; à l’aviation mondiale avec les données de IATA, aux transactions et accords commerciaux avec l’OMC, aux données du WEF, du CERN. Afin de continuer d’utiliser la métaphore des matières premières, Genève repose sur une mine d’or et personne ne s’y intéresse. Ces agences onusiennes travaillent en silo. Financées par les gouvernements, leur mission est justement de collecter puis transmettre les données à leurs membres.

Face aux géants de la technologie américaine (GAFA) et chinoise (BAIDU), l’Europe et donc la Suisse et Genève n’ont-elles pas une bataille de retard?

Les GAFA sont des géants car on les a laissés grandir. En Europe et à fortiori en Suisse, règne un cruel manque d’action, de vision et de connaissance dans le domaine, face aux GAFA, qui nous ont imposé leur modèle colonial. Aujourd’hui, l’Europe réagit au lieu d’agir pro-activement. Si s’opposer farouchement aux GAFA est un combat perdu pour l’Europe et la Suisse, développer un nouveau modèle de gouvernance dans l’économie digitale, basé sur la confiance – ce que permet justement la blockchain – est la position gagnante. J’ai beaucoup d’espoir et la blockchain va amoindrir ce système centralisé, voire centralisateur des GAFA. Vous voyez beaucoup de projets blockchain développés par Facebook ou Amazon? Non, c’est justement la technologie anti-GAFA par excellence.

Zoug a pris de l’avance comme pôle de référence mondial dans les crypto-monnaies. Comment Genève peut-elle devenir un hub international de la blockchain?

Un énorme travail a été fait par Zoug et son pôle d’excellence. Le Canton a compris et adapté sa législation en conséquence. Il est notamment possible de payer en bitcoin. Le succès international de Zoug inspire Genève, qui commence à faire la même chose, mais dans la blockchain. Trop nombreux sont les gens, y compris au sein du département de la promotion économique, à faire encore l’amalgame entre crypto-monnaies et blockchain. Zoug conserve la partie spéculative et Genève doit réussir son positionnement dans la blockchain, en tant que plateforme d’application, selon un modèle de confiance. C’est dans son ADN avec la banque privée depuis des décennies. Il est temps de passer d’une ville analogue à une ville digitale de confiance.

Quel est le budget d’investissement de Wisekey dans ce projet de hub blockchain?

En vendant pour 45 millions de dollars une technologie qui intéressait les Américains, nous pouvons alors dégager cette somme substantielle dans le projet de hub mondial blockchain. Vous savez, si ma société était cotée au Nasdaq, elle serait valorisée 10 fois son chiffre d’affaires et non 2,5 fois comme c’est le cas sur le marché suisse. Mais il faut bien commencer par quelque chose et j’ai grand espoir pour Genève, même si la Suisse manque de late stage financing et que la BNS investit dans les GAFA et non dans les start-up suisses. L’investissement que Wisekey dédie à ce projet passe aussi par l’ouverture de mon carnet d’adresses. J’ai rencontré Don Tapscott à Davos il y a 3 ans. Il est actif dans mon comité stratégique depuis. Il sera le keynote speaker du Geneva Annual Blockchain Congress lundi, avant de partir pour le WEF où Wisekey organise un panel, en présence de Brad Smith, président et avocat général de Microsoft, que je connais depuis 25 ans et qui plaide pour une «convention de Genève numérique.»

Que manque-t-il à ce stade pour réussir un tel pari?

Une vision laser et non rainbow. A l’instar du fameux slogan Make America Great, je dirais Geneva First Digital. On ne se remet pas assez en question ici. Nous pouvons réussir à instaurer un modèle de gouvernance humaine, fiable, de confiance, reposant sur la blockchain et non sur un système centralisateur, de perte d’identité digitale comme le système mondial dominé par la Silicon Valley. Genève peut devenir la capitale de la 4ème révolution industrielle. Imaginez le destin du monde si Tim Bernes-Lee, qui sera présent à Davos dans notre panel d’ailleurs, avait réussi à convaincre les autorités à l’époque de garder la souveraineté d’internet à Genève. Il manquait alors une vision politique et Tim est parti au MIT, qui a immédiatement vu le potentiel en lui offrant les bases de développement de son consortium W3C.

Genève possède toute la légitimité. Hurry-up!

by Elsa Floret

Tags: davos2019